N’oublions pas que Neyrpic est d’abord le nom d’une belle entreprise grenobloise qui était très active dans les domaines de l’hydraulique et de la mécanique. Elle employait beaucoup d’ouvriers, soudeurs, techniciens et ingénieurs qui ont apporté leurs volonté et compétences à la construction de l’industrie et du secteur énergétique dont nous bénéficions aujourd’hui. Ce fut aussi le cadre de conflits sociaux auxquels des issues ont été trouvées vers le haut. De tout ce passé, il reste des fleurons dans GE (ex Alstom énergie), Artelia ainsi que dans les entreprises de la mécanique et hydraulique de l’aire urbaine et au-delà qui étaient réunies à Alpexpo aux rencontres Business Hydro du 8 et 9 octobre. Ces entreprises montrent la vitalité d’un secteur industriel qui a su mener sa barque dans les eaux agitées de la mondialisation en évitant la désindustrialisation dont notre pays et l’Europe souffrent.
D’une fierté industrielle au temple de la consommation de masse….
Comme prévu, cet événement a déjà un impact visible sur le commerce de proximité en centre-ville. Il suffit de voir les vitrines autour de la place Victor Hugo informant leurs clients de les rejoindre dans le nouveau temple. La ville de Grenoble, par l’intermédiaire de sa représentation politique a laissé sa chaise vide marquant ainsi le refus de participer à la conception de l’accord préalable Neyrpic. Incroyable ! Pour un sujet aussi impactant ! Les habitants de Grenoble ont ainsi été privés de tout poids dans la négociation.
La stratégie de la ville de Grenoble pour son commerce, à travers les prises de paroles récentes d’élus, dont l’adjoint au commerce, apparaît des plus confuse voire décalée. Les habitants n’y comprennent plus rien ! Comment la politique de la chaise vide peut-elle donner crédit à toute critique a posteriori ? La partie s’est jouée. Elle est terminée. Il faudrait semble-t-il l’accepter pour pouvoir travailler sur le futur.
Or le futur pour les Grenoblois et leur commerce en ville, ce n’est probablement pas de pointer les torts et travers des autres alimentant des débats stériles.
Comme Le directeur d’Apsys, gérant de la zone commerciale Neyrpic, l’a dit: « Neyrpic ne peut endosser la responsabilité des toutes les difficultés auxquelles le centre-ville de Grenoble est confronté. L’accessibilité et la sécurité restent des facteurs d’attractivité importants pour les enseignes. » Une spécialiste de ces questions, Virginie Monvoisin, économiste grenobloise : « Les centres-villes ne souffrent pas tant de la concurrence des grandes surfaces mais plutôt de problèmes d’accessibilité, … ». Et enfin Une Grenobloise le jour de l’inauguration de Neyrpic : « Tout est là, c’est parfait. La ville ? Non, il n’y a pas assez de places pour stationner. »
Une des pistes audibles pour le futur, au sens qu’elle vient du terrain commerçants-études-clients non grenoblois, est le sujet de l’accessibilité du centre-ville, sur lequel nous avions attiré l’attention des candidats aux municipales en 2019. Tout raisonner au prisme du vélo et de la trottinette est certainement bien trop réducteur pour pouvoir élaborer des compromis constructifs. Pire cela monte les Grenoblois entre eux ne permettant pas de construire de façon apaisée un espace commun. De son côté, la zone commerciale Neyrpic en créant un parking en silo a une autre idée des modes de déplacement de leurs consommateurs. Preuves qu’il y a bien des clients identifiés pour venir en voiture, en nombre semble-t-il.
Certes le contexte sociétal général impacte la dynamique de développement de nos centres-villes. Mais il n’y a pas de fatalité comme le montre l’histoire des cités qui ont chuté et se sont relevées de tout temps. Lutter contre l’abaissement des centres-villes est possible à travers des leviers bien concrets comme la mise en avant des richesses historiques et actuelles dans le centre historique et en améliorant la propreté et la civilité. Mais pour cela il faut retrouver l’amour de sa ville et de ses habitants. De nombreuses municipalités s’ingénient pour trouver des solutions qui renforcent la vitalité de leurs centres de vie. Hélas, à Grenoble, nous subissons aujourd’hui une double peine d’attractivité et d’offres concurrentes, et tous ces nouveaux espaces vides accélèrent probablement l’effet domino de chute de l’attractivité du centre-ville.
Les mois, les années à venir confirmeront ou infirmeront les craintes exprimées. Neyrpic n’est certes pas l’origine de tout mais peut-être est-ce le facteur de trop ?
Ce qui est sûr, il faut du temps et beaucoup d’énergie pour reconstruire des écosystèmes. La tâche va être forcément complexe pour les institutions locales, la Ville et la Métropole. Mais elle n’est pas insurmontable. Pour y parvenir, il faudra écouter et réconcilier les Grenoblois qui aiment leur cité.